Archives du sériographe

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Notes pour une archéologie du signifiant fr série

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    série linéaire

    Irpli
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    seriata


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    série topographique : Series-City
    Date d'inscription : 16/12/2004

    série linéaire Empty série linéaire

    Message  Irpli Ven 17 Déc 2004 - 3:55

    "series" en latin définit un "ensemble de choses qui se tiennent", se paraphrase notamment par "entrelacs". Cette idée de "choses qui se tiennent" n'est pas si continue que "suite, succession". Elle est présente dans la racine "ser-" qui a donné en français (bien avant de donner "série") : dissertation, sermon, désert (et oui ! désert est l'absence de série)... et quelques-autres (voyez le Dictionnaire étymologique du français de Jacqueline Picoche qui range les mots par leur racine et les développe en... séries).
    Or cette hémorragie du concept est la raison précise pour laquelle je me suis attaché au mot lui-même et non à une idée. L'univers entier a passé par ce mot, donc la contrainte ne me pèse guère et me permet de toujours savoir à quelle(s)branche(s) de l'histoire ramifiée de "série" j'ai affaire.
    Hugo parle de la série de l'alphabet.
    Au début du XXe siècle, on se battait comme des chiens sur l'emploi de "série". Dans son vocabulaire de la philosophie, Lalande écrit :


    Série linéaire est très usuel dans le langage de la philosophie contemporaine, mais souvent dans le sens sens, où linéaire n'est qu'un pléonasme destiné à parler à l'imagination. On l'oppose alors à un ordre complexe, et l'on entend par là une succession de termes tels que chacun d'eux n'ait qu'un seul antécédant et un seul conséquent immédiats. Mais c'est là un caractère même de la série. On n'appellerait pas proprement de ce nom une suite à double entrée, ni un arbre généalogique ramifié. Quand on parle de la série des ancètres d’un homme, on l’entend en général des ascendants en ligne paternelle, comme dans la généalogie de Jésus Christ selon saint Mathieu ou saint Luc Et de même l'expression "série animale" n'at-elle pas pour origine et pour sens l'idée d'une suite unique entre toutes les formes vivantes ? C'est même précisément cette conception d'une "chaîne des êtres" que Cournot réfute dans le second passage cité.
    On parle, au contraire, avec raison d'"ensembles linéaires" qui sont définis "des ensembles de nombres réels inégaux qu'on peut toujours ranger à la suite les uns des autrespar ordre de grandeur, de façon qu'ils ne forment qu'une seule file". COUTURAT, L'Infini mathématiuqe, p.625
    Mais, d'autre part, au premier sens, qui oppose linéaire à circulaire, le terme est mal choisi : linéaire ne veut pas dire rectiligne, ni "qui forme une ligne ouverte" ; une chaîne peut très bien se refermer sur elle-même. De sorte que ni dans un cas ni dans l'autre l'expression n'est satisfaisante.



    Mais déjà l'industrie avait fait ses choux gras de "série". Tout au long du XIXe siècle, le mot entre dans la presse, dans l'administration, dans le commerce, pour décrire des actes réguliers. Vers 1905 apparaît la fameuse : "production en série". L'idée de répétition n'est présente qu'à la fin du XIXe siècle. Elle prend une importance croissante jusqu'aux années d'après-guerre où elle devient dominante. Aujourd'hui, on associe beaucoup "série" à une idée de répétition. Mais c'est très réducteur.

    Et puis je crois que j'ai un corps-série. Parfois du moins.

      La date/heure actuelle est Ven 19 Avr 2024 - 0:53